Constance et Gabin étaient arrivés à Intimatopia la veille au soir. Après avoir dit bonjour aux amis et nouveaux venus déjà arrivés et pas encore couchés, ils étaient montés dans la chambre qu’ils occupaient ensemble depuis déjà deux retraites. C’est Constance qui avait fait découvrir Intimatopia à Gabin. Cette retraite artistique avait été créée cinq ans auparavant par Lulu et Ben lorsqu’ils avaient fait l’acquisition de leur maison dans le Perche. Chaque hiver après les Fêtes, ils ouvraient leurs portes à leurs amis artistes afin de leur proposer un refuge, un lieu où créer et échanger sur leur art dans une ambiance communautaire et libre. Constance était amie avec Lulu depuis quinze ans. Elles s’étaient rencontrées en école d’art et elles étaient devenues très proches. Peu de temps après Lulu avait fait la connaissance de Ben et toute sa vie avait commencé à tourner autour de la construction de son couple. Même sa pratique artistique puisait dans ces thèmes. Constance était restée proche de ses deux amis, même si la vie qu’elle avait menée jusqu’ici était assez éloignée de la leur.
Comme à son habitude elle se réveilla tôt, un peu perdue dans ce lit immense qui était la caractéristique d’Intimatopia. Tout était calme. Elle entendait la respiration légère de Gabin à côté d’elle. Il lui tournait le dos, presque au bord du lit. Constance faisait souvent ça. Elle se collait à lui pendant la nuit et le poussait petit à petit, laissant une bonne partie du matelas inoccupée de son côté. Elle se colla à lui un peu plus et l’embrassa dans le dos. Elle se réveillait souvent avant lui et elle avait en général pris l’habitude de l’attendre sagement, essayant de replonger dans la douceur du sommeil, mais elle était un peu trop excitée pour cela ce matin. À chaque fois qu’elle arrivait à Intimatopia elle se sentait chez elle, à la fois paisible de se retrouver dans l’endroit le plus silencieux de la Terre et impatiente que commencent les festivités. Il n’était pas encore huit heures, mais Constance savait que Lulu ne mettrait pas longtemps à se lever. Elle se décida donc à sortir du lit douillet pour descendre dans la cuisine en robe de chambre. La maison était encore sombre et silencieuse. Constance aimait ça. Se lever avant les autres, vider le lave-vaisselle et préparer la cuisine pour le petit déjeuner. Être la première de fait, et ne rien manquer du lancement de la journée. Elle commença par ouvrir les volets de la cuisine. À cette heure, le village était encore plongé dans la brume. La journée serait grise, mais cela avait peu d’importance. Elle lança la cafetière et prépara une grande théière. Lulu avait anticipé et il restait encore beaucoup de pain pour le petit déjeuner. Constance ne faisait pas partie des gens qui aimaient sortir à la boulangerie avant d’avoir avalé quelque chose. Contrairement à Gabin. Les gens plaisantaient souvent sur le sujet en disant que c’était pour cette raison que leur couple allait durer. Constance riait, mais elle gardait pour elle ce qu’elle pensait. Elle s’assit à la grande table de la cuisine et attendit devant sa tasse que le thé ait infusé. C’est alors qu’elle entendit une voiture remonter dans l’allée de graviers puis une portière claquer. La petite clochette dans l’entrée tinta et quelqu’un rentra avec un fracassant « BONJOUR LÀ-DEDANS !! ». C’était Aymeric, qui n’avait pas pu partir la veille. Lui qui s’attendait à une entrée en fanfare, il fut manifestement surpris et un peu déçu de trouver Constance seule.
– « Ah, salut ! Tu es la seule levée ? »
Il posa son sac sur le sol et, après une hésitation, s’approcha pour lui faire la bise.
– « Oui, je pense que Lulu ne devrait pas tarder. »
***à suivre***