Presque mort

C’est comme s’il était déjà mort. Sa famille a cessé d’aller le voir pour ne pas avoir à affronter son visage ravagé. Les souvenirs de lui avant la maladie se font lointains et de plus en plus vagues.

Les rancœurs éventuelles ont disparu. Il n’est plus le même et le voir est une souffrance. On préfère construire une légende : celui qu’il aurait pu être, celui qu’il était presque si l’on passe sur certains détails. À terme on sait que l’on fera preuve, avec son souvenir, de plus d’indulgence que l’on n’en a jamais fait de son vivant.

Il y a une tristesse, non pas de le perdre, mais de savoir qu’il se débat dans un simulacre de vie. Il faudrait en finir, pour lui, pour tout le monde. Mais ce n’est pas pensable. Ce serait trop horrible.

Mais finalement on l’a déjà oublié là-bas. Il est mort au moment où il est entré dans sa maison de retraite. Il a cessé d’avoir une existence propre, il est devenu une marionnette. On ne veut pas voir les marionnettes, elles sont notre reflet dans le miroir.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *